DE VOUS AIEUX, en passant par moi !

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K comme Kerfourn

Kerfourn est une commune située dans le Morbihan.

 

Pourquoi avoir choisi cette commune plutôt qu'une autre ?

 

Premièrement parce qu'il me fallait un article pour la lettre K et deuxièmement il y a beaucoup de communes commençant par la lettre K en Bretagne.

 

Comme beaucoup de communes Kerfourn  possède un monument aux morts. Je ne l'ai pas choisi pour son originalité car il est plutôt commun.

 

On est sur un obélisque sur socle des plus traditionnels, orné d'une palme et doté d'une croix de guerre à son sommet. et entouré de grilles.

 

Si je précise tous ces ornements, c'est qu'ils ont une valeur symbolique qui fera l'objet d'un prochain article.

 

Donc rien de transcendant à priori.

 

Ce  qui m'a fait choisir cet édifice plutôt qu'un autre, ce sont les documents que j'avais à ma disposition fruits de la recherche et du travail  de deux érudits  que je me dois de citer : Joêl Marivain et Bénédicte Piveteau.

 

L'histoire de  ce document est largement documentée et vous pourrez retrouver les photos des dits documents sur le site de l'Université de Lille 3 consacré aux monuments aux morts

 

Qu'apprend-on à la lecture de ces documents ? Toute la genèse et l'histoire de ce monument au travers d'échanges de courriers entre le Maire de Kerfourn de l'époque et le Préfet, les diverses délibérations du Conseil Municipal, le plan du projet,  le financement et le coût final de l'opération....

 

Tous ces documents ont été retrouvés aux Archives Départementales du Morbihan probablement dans la série O.

 

L'histoire de ce monument commence début 1921 par la désignation de "l'agent voyer" du département pour élaborer les plans du dit monument et en suivre les travaux.

 

L'agent voyer était le fonctionnaire chargé de veiller à l'entretien et/ou l'aménagement des voies de communication, de la voirie d'une ville ou d'un département.

 

plan kerfourn

source AD Morbihan

 

 

Ceci étant accepté par le Préfet, on apprend ensuite que le monument fera l'objet d'un financement croisé : 4000 francs au titre de la commune, 2302 francs récoltés par souscription, d'une subvention au titre du département, et d'une subvention de l'Etat.

 

Le Préfet précise que la subvention départementale sera de "10 francs par morts constatés" "sans que celle-ci puisse dépasser un quart de la dépense engagée pour la construction du monument"

 

Quant à la subvention de l'Etat elle sera établie suivant un barême tenant compte :

 

  • de la population de la commune
  • du nombre de morts
  • de la valeur du centime communal (1)

 

On reconnait là bien notre administration !

 

Pour percevoir ces subventions, le Maire devra certifier le nombre de morts. ce qui sera fait par l'envoi d'un certificat en bonne et due forme le 10 octobre 1921. Ce nombre est arrêté à 65.

 

Le devis initial du 15 septembre 1921 s'élève à 7600 euros. Cette somme tient compte également des imprévus à hauteur de 1100 francs.

On peut en déduire que la subvention départementale a été de 650 francs et qu'elle n'a donc pas dépassé le quart de la dépense engagée estimée à  2000 francs.

 

Intéressons nous maintenant à la souscription publique. C'est en fait une somme de 2310 francs qui sera  récoltée. On connait la liste des contributeurs ! Parmi ceux-ci Mme LE LANNIC et Mme MAUGAIN qui sont les plus gros contributeurs. A elles deux elles verseront  près de 900 francs. Ce qui pour l'époque représente une grosse somme.

 

Sur le monument apparaissent effectivement ces deux patronymes. Ceci explique peut-être cela !

 

Jean-Marie MAUGAIN né le 3 août 1882 à Kerfourn, décédé le 2 octobre 1915 à Saint-Rémy-sur-Bussy dans la Marne. valide le projet

Joseph-Marie MAUGAIN né le 29 décembre 1884 à Kerfourn, décédé le 11 novembre 1914 à Villers-Cotterêts dans l'Aisne.

Emile Bénoni LE LANNIC né le 28 mai 1888 à Kerfourn décédé le 16 août 1917 à Génicourt dans l'Aisne.

 

Par contre on ne sait pas si ces dames sont les veuves ou les mères de nos poilus. mais la fiche "Mémoire des Hommes" de Jean Marie MAUGAIN précise qu'il était aumônier militaire donc peut être prêtre.

Dans ce cas Mme MAUGAIN pourrait bien être sa mère. En tout cas après vérification dans les registres de naissance Jean-Marie et Joseph Marie MAUGAIN sont frères.

 

Le 19 décembre 1921 "la commission spéciale chargée de l'examen des projets" (2) d'érection valide les plans du monument.

 

Le 18 janvier 1922 le Préfet approuve le projet.

 

Reste à trouver un emplacement.

 

La municipalité se met d'accord pour implanter le monument au Nord de l'Eglise. D'ailleurs cela tombe bien un administré est prêt à céder gratuitement un terrain à la commune pour permettre l'érection du monument à l'endroit choisi.

Mais il émet deux conditions :

 

1°) Que le monument soit bel et bien édifié à cet emplacement

2°) Et que sur le monument soit apposé une croix.

 

Le conseil municipal délibère et approuve cette proposition par une délibération du 11 juin 1922.

 

Par un courrier du 19 juin, le Préfet refuse cette proposition et oppose la Loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat. En effet aucun signe religieux ne peut être apposé sur un édifice public et demande au conseil municipal de revoir sa copie. A défaut le monument pourra être érigé dans le cimetière qui n'est pas soumis aux mêmes conditions.

 

Il semblerait que le gentil donateur ait renoncé à sa croix car le monument a bien été construit à la place initialement prévu et il n'a pas bougé depuis.

 

C'est l'entrepreneur Joseph Vernery qui se chargera de la construction.

 

L'inauguration aura lieu le 14 octobre 1923 en présence de tous les corps constitués.

 

Selon le décompte de paiement, le coût final de la construction s'élèvera à 8509,20 francs.

Soit un delta 900 francs dont l'histoire ne dit pas comment il a été financé.

 

(1) le centime communal ou centimes additionnels étaient perçus sur la base des impôts nationaux au profit de la commune et du département. Ils constituaient avec l'octroi pour les communes concernées, l'essentiel des ressources ordinaires des collectivités. L'introduction de la fiscalité locale à partir de 1958 a entraîné leur disparition.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



13/11/2023
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