DE VOUS AIEUX, en passant par moi !

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W comme Wintzenbach

Les monuments alsaciens et mosellans  sont des cas à part !

 

Replaçons nous tout d'abord dans le contexte historique de l'époque et rappelons pour mémoire qu'après la défaite de 1870, les départements d'Alsace et de la Moselle ont été  annexés par l'Allemagne.

 

Suite à  cette annexion , les alsaciens et les lorrains ont eu jusqu'au 1er octobre 1872 pour choisir entre rester français et quitter leur région natale ou devenir citoyen de l'empire germanique.

 

Certaines familles attachées à la France refusent donc l'annexion et émigrent soit en France, soit en Algérie ou aux Amériques. 

 

Beaucoup choisissent de partir provisoirement quelques jours avant la date butoir  dans des départements limitrophes pour  pour pouvoir retourner le plus vite possible dans leur village natal reprendre leurs occupations;  pensant que le simple fait de faire l'aller-retour leur confère définitivement la nationalité française.

 

La plupart de ces naturalisations seront annulées par les autorités allemandes.

 

Après 1872; les alsaciens-lorrains sont autorisés à émigrer pour aller chercher du travail ailleurs s'ils ne sont pas soumis aux obligations militaires . Les émigrations clandestines sont alors le fait de  jeunes gens qui refusent d'endosser l'uniforme allemand.

 

Traverser la frontière est assez facile. André et Julien Volden les deux jeunes héros du "Tour de France par deux enfants" de Augustine Fouillée-Tuillerie alias G.Bruno la traverseront quant à eux sans problème.

 

Par contre dans le cadre d'une émigration clandestine, la nationalité allemande se perdait au bout de dix ans de résidence continu en pays étranger ou de 5 ans en Amérique ou simplement par suite d'une naturalisation.

 

Le décor étant planté que se passe-t-il au moment de la déclaration de guerre en août 14. 

 

La majorité des alsaciens-lorrains résidants sont incorporés dans l'armée du Kaiser  soit entre 350 000 et 380 000.

 

Pour les autres deux cas de figure :

 

Les "déserteurs"  (environ 18 000)  viennent s'engager dans l'armée française. Considérer comme allemands ils intègrent très souvent la légion étrangère et afin de "les protéger" du peloton d'exécution en cas de capture par les allemands, ils sont envoyés loin du front, en Afrique du Nord et d'autant plus s'ils ne maîtrisent pas le français

 

Pour "les émigrés" et s'il sont en âge de se battre ils intègrent également l'armée française à fortiori s'ils ont opté entre temps pour la nationalité française. Ils sont parfois obligés de changer provisoirement de patronyme au profit d'un nom plus "français".

 

C'est le cas par exemple de Pierre Gross  né à Kalhausen le 19 février 1877 qui est l'aîné d'une fratrie de 11 enfants.

Il effectue donc son service militaire dans l'armée allemande puis à l'issue de ce dernier émigre clandestinement à Paris pour trouver du travail et rejoindre une partie de sa famille qui avait opté pour l'émigration dès 1870. Il ne demande pas pour autant sa naturalisation et épouse en 1912 Honorine DEJEAN.

 

A la déclaration de la guerre, son statut de citoyen allemand résidant en France va poser un réel problème tant pour lui que pour sa femme devenue allemande par mariage.

 

Pierre GROSS étant toujours mobilisable, n'a d'autre choix que de s'engager dans Légion en demandant de façon concomitante sa naturalisation. Il sera envoyé sur le font sous le nom de jeune fille de son épouse et deviendra pour l'ensemble de ses camarades Pierre DEJEAN.

 

Dans le même temps, quatre de ses frères seront mobilisés dans l'armée allemande. Un d'entre eux sera porté disparu.

 

Pierre GROSS dit DEJEAN sera tué le 24 juillet 1915. Il avait 38 ans

 

Deux frères "ennemis" réunis dans la mort.

 

Mais revenons à nos monuments aux morts.

 

Dans ce contexte compliqué, on ne trouvera donc pas de monuments avec la mention "Morts pour la France" ou "Morts pour la patrie" ou bien encore "Morts aux champs d'honneur" . On inscrira de préférence des dédicaces plus.....neutres comme "A nos morts" ou "A nos victimes de la guerre".

 

Pas de symboles patriotiques, pas de drapeau tricolore, pas de coq gaulois, et pas de poilus non plus !

 

L'Alsace et la Moselle étant toujours sous le régime concordataire, les monuments aux morts seront édifiés principalement prés des églises ou dans les cimetières et les motifs décoratifs seront majoritairement référence à des représentations religieuses (calvaires, crucifix, piéta...)

 

Ni patriotique, ni civique, les monuments alsaciens se veulent avant tout des monuments funéraires à caractère religieux, intégrateur voire pacifique.

 

Le monument de Wintzenbach (67) est un cas unique en Alsace !

 

Il représente un soldat français et un soldat soldat allemand  réunis dans le bras de leur mère alsacienne.

 

Il résume à lui tout seul l'histoire mouvementée de ce territoire. !

 

Ce monument a été érigé tardivement (1994) une fois les passions d'après guerre apaisées.* 

 

Dessiné par Alain MENARD, le monument a été réalisé par François SAUR.

 

Wintzenbach

 

Monument de Wintzenbach

Photo : Elisabeth Heller

 

* cf l'histoire des "Malgrés-Nous"

 

sources : 

 Association Historique de Kalhausen

Encyclopédie d'Histoire Numérique de l'Europe 

Le monument aux morts de Biesheim

Base de données de l'Université de Lille 3

 

 

 

 

 



27/11/2023
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